mercredi 7 décembre 2016

Géométrie, mais pas que...




J’ai déjà parlé de géométrie, d’axe ou d’angles, qui sont les bases des arts martiaux internes. Cette rigueur physique est indispensable à la réussite et à l’efficacité de nos mouvements. C’est un travail et une étude de longue haleine auxquels doivent se confronter tous les pratiquants recherchant la maîtrise de ces arts. Mais bien que cette recherche soit complexe, longue et minutieuse, elle ne suffit pas à atteindre le niveau que nous recherchons, à savoir, la capacité de manipuler, dominer l’autre. Ce « seul » travail technique permettra une certaine efficacité, mais seulement incertaine et pas absolue… 

Pour dépasser ce niveau « physique », il faudra passer de l’autre côté. Dans l’interne, dans la martialité, la motricité fine… Il faudra aussi être capable de maîtriser tout cet aspect des arts martiaux pour passer dans ce qui fait d’eux les arts internes : la sensibilité.

Dans notre École, tous les exercices à 2 posent cet aspect en toile de fond. Toute approche, tout contact, toute manipulation dépend de la relation que nous créons et maintenons avec l’autre. Pour cela il faut avoir une sensibilité accrue afin de ressentir s’il faut mettre plus, moins, de force, de détente, de lourdeur… s’il faut diriger vers telle ou telle direction et jusqu’où aller… L’ensemble des enchainements est aussi là pour développer chez nous cette sensibilité. 

Les arts martiaux internes s’opposent en ça avec de nombreuses pratiques martiales ou sportives : ils développent nos sensations et les affinent plutôt que de les annihiler en frappant fort, brutalement, pour « exploser » l’autre.

Notre Maître nous dit souvent qu’il faut choyer l’autre, le mettre dans un meilleur état qu’il ne l’est au départ pour qu’il se laisse faire. Nous devons lui proposer des conditions positives pour qu’il accepte d’être manipulé. Mais pour réussir cet exercice il nous faut d’abord ressentir tous ces changements, toutes ses réactions. Il faut être capable de les ressentir, de les lire et les interpréter correctement. Pour que l’autre ne s’oppose pas à nous il faut lui donner envie de faire ce qu’on attend de lui… 
C’est là la plus grande difficulté des arts martiaux internes : Donner envie à l’autre de faire ce qu’on veut qu’il fasse. C’est une manipulation de « haut vol » dont la clé est une sensibilité extrême. Ce principe rejoint les autres principes des arts martiaux internes : finesse, justesse, ouverture et prise en compte de l’autre.

Donc, en plus de respecter toute la géométrie et les contraintes physiques, il faudra être capable de développer notre sensibilité. Mais sans doute que le lien entre les deux n’est pas si éloigné qu’il peut le paraitre…

samedi 25 juin 2016

Géométrie et arts martiaux



Plus j’approfondis l’étude des arts martiaux internes et plus je prends conscience qu’une grande partie de leurs secrets réside dans la complexité des mathématiques « appliquées ».

Il y a plusieurs années, j’ai lu un livre qui montrait comment les mathématiques pouvaient devenir concrètes, en lien avec la réalité qui nous entoure. Comment elles pouvaient tout expliquer et nous permettre de tout comprendre…

Plus j’avance dans la pratique martiale et plus je me rends compte de cette implication.

En effet, dès le premier cours dans notre école, nous vous parlerons des angles. 

45, 90, 180 degrés. Toutes les postures sont régies par ces angles. Leur importance est capitale. Se tromper de quelques degrés entraine inéluctablement une posture erronée et sclérosée… Il faudra donc de la rigueur et de la répétition pour distiller dans notre corps l’angle juste pour construire telle ou telle posture.

Il y a ensuite les alignements. Les coudes, les poignets ou encore les talons doivent être alignés avec telle autre partie du corps. Sinon, la structure de nos postures sera friable, légère, fragile et elle ne nous permettra pas d’obtenir la stabilité et la lourdeur nécessaire à l’efficacité dans nos mouvements. 

Il ne faut pas non plus oublier le chemin à prendre pour obtenir les bons angles et les bons alignements…

Rapidement, nous vous parlerons également de l’axe, comme j’en ai parlé précédemment.

Mais comme cette liste n’est pas exhaustive, l’autre jour, notre Maître nous a parlé de symétrie…

Comment expliquer qu’un mouvement est symétrique alors qu’un de nos bras est plus ou moins tendu devant notre corps et l’autre a le poing sur la hanche ? 

Comment justifier qu’une posture est symétrique alors que la position et la forme des bras sont différentes ?

Notre travail est d’être, soit capable de la justifier, soit de changer quelque chose pour la rendre justifiable.

Voilà encore un nouveau challenge à relever… 

Il est indéniable que la résolution de cette problématique reste inévitable pour faire évoluer notre efficacité. 

C’est ce que nous démontre notre Maître par des exemples sur des techniques avec un adversaire. 
C’est indiscutable : nous créons une symétrie dans nos mouvements en tenant compte de notre adversaire, et la technique fonctionne. 
Nous ne mettons pas en place cette nécessité géométrique, et ça ne marche pas ! 

Il est temps de reprendre nos leçons de mathématiques…

mardi 24 mai 2016

Comment atteindre l'efficacité ?



Certains pratiquants d’arts martiaux ont comme motivations la recherche du bien-être, pratiquer une activité physique, rechercher un certain équilibre, etc… 
Pour ma part, ce sont des conséquences positives, mais secondaires. Depuis ma jeunesse je pratique les arts martiaux avec comme motivation principale l’efficacité. Être capable de défendre ma vie et celle de ma famille dans une situation de danger de mort. 

Je pense que la véritable maitrise n’est pas forcément d’exploser, de pulvériser mon adversaire, mais d’être capable de le neutraliser. 
Quelle différence me direz-vous ?
On peut penser qu’être fort permet de vaincre un adversaire avec un instinct sauvage, primaire, mais qui permet de terrasser l’autre. C’est vrai. 
Mais pour moi, être vraiment fort c’est être capable de neutraliser un adversaire en douceur. Avec la capacité de le détruire à n’importe quel moment. C’est rester serein devant cette menace de mort, sans peur, sans perte de nos capacités, sans avoir le cœur qui s’emballe, le souffle court et les jambes coupées. 

Or après 20 ans de travail martial, je crains d’être paralysé devant une telle menace. Quelle perte de temps, d’efforts et d’énergie, si je me faisais balayer comme un moins que rien, après tant d’années de pratique…

Acquérir les techniques, les appliquer et être efficace avec nos partenaires d’entrainement n’est pas un gage de victoire dans une situation réelle de danger. Tant de paramètres sont différents, entre réaliser un exercice entre nous dans notre école et dans la « vraie vie », que je me pose la question : serai-je efficace au moment où je devrai l’être ?

Il s’agit davantage de réussir à Être plutôt qu’à Faire (bien que ces deux aspects se nourrissent l’un l’autre…). Mais il est certain que la technique réalisée avec la peur au ventre ne sera pas aussi efficace que celle effectuée dans notre cadre « scolaire », avec sérénité, détente et sous les conseils précieux de notre Guide... 
Comment rester aussi efficace que dans ces moments ?

Il s’agit bien d’un problème de savoir comment être au moment de mettre en place notre savoir-faire. C’est ce savoir être qui déterminera l’efficacité de notre savoir-faire, lorsque nous aurons à le mettre en pratique…

J’ai donc posé ces doutes à mon Maitre.

Et mon Maître m’a dit : « Lorsqu’une situation de combat se dessine, tu dois penser à mettre tellement de choses en place, que tu ne peux pas penser que l’autre parait plus grand, plus fort, plus méchant que toi ». 

Et c’est vrai que si nous prenons l’exemple de la conduite, imaginez-vous prêt à prendre un virage serré à vive allure. Nous nous mettons sur le rapport de vitesse qui nous parait approprié, nous adaptons l’allure, pour être en pleine vitesse au point de corde, nous calculons les angles d’arrivée de notre trajectoire et de sortie du virage en tenant compte de la forme de la courbe. Pendant plusieurs secondes, nous vivons une succession d’instants présents qui ne sont que calculs, évaluations des paramètres, adaptations « millimétrées » à la situation, etc… Après coup, nous réalisons ce que nous avons fait, les risques pris etc… Mais sur le moment, nous n’avons pas eu le temps de penser au danger, nous avions tellement d’autres choses à faire… 

Dans la pratique des arts martiaux internes, nous devons entrer dans ce même phénomène. Et ce ne sera qu’après que nous aurons le temps de réaliser le véritable danger auquel nous nous sommes confrontés…

Une phrase mainte fois entendue me vient à l’esprit : « Tu dois te recentrer et faire ce que tu as à faire ».



dimanche 24 avril 2016

Sensation universelle ?




Pouvons-nous dire qu’une sensation est universelle ? Ressentons-nous la même chose que l’autre lorsque nous sommes tristes, amoureux, joyeux ou face à la douleur ? Probablement que non. Même si d’une certaine manière, nous avons une base commune, nos chemins de vies tous différents font qu’une même situation vécue n’aboutira pas à une sensation identique pour chacun d'entre nous.

Mais je pense que ce n’est pas le cas pour les arts martiaux traditionnels. 

En effet, je pense qu’ils permettent de créer une sensation commune, puisque nous nous attachons à mettre en place un cadre commun, "universel", entre tous les pratiquants d’une même discipline. Ce cadre est un lien entre chacun de nous, adeptes de ces arts traditionnels. Le disciple devant se plier à la restriction et l’exiguïté qu’impose « Notre Maître »,  sous le guidage de ceux qui s’y sont déjà pliés. Nous suivons donc le même « chemin martial », en suivant pas à pas celui de nos Maîtres. En ce sens, il est probable que la sensation créée, quand les mouvements et les postures sont correctement réalisés, est identique à celle ressentie par ceux qui nous ont précédés. 

Aujourd’hui, en mettant en pratique les derniers éléments donnés par mon Maître (savoir d’où on vient), je ressens une sensation qui à mon avis est commune à ceux qui pratiquent les arts martiaux internes. 

Mettre des mots sur ce que je ressens est périlleux, puisque le verbe est propre à chacun et nous éloigne donc de la possible « universalité » ressentie, mais je vais quand même tenter l’exercice…

« Ploum ». Ça a l’air assez enfantin, décalé, j’en ai bien conscience, mais c’est le terme que j’utiliserais pour qualifier cette sensation. 

Pourquoi ce terme ? Bien qu’il me soit apparu comme une évidence, après réflexion, il s’agit de la fusion de « Plouf » et de « Boum ».

« Plouf », avec sa connotation aquatique, que nous avons tous déjà entendue, ressentie, en jetant un caillou dans un puits. Cette sonorité due à l’entrée du caillou dans l’eau. Cette vibration remontant le long du tunnel vertical. Le choc d’un élément massif, absorbé par une matière liquide. L’énergie de l’impact transmise à l’eau. Il y a échange, mélange, transmission d’énergie entre ces 2 milieux. Création d’une nouvelle énergie. C’est une vibration diffuse, presque aérienne. Un mélange de plein créant un vide. Une lourdeur teintée de légèreté. Un élément descend, l’autre monte, jaillie. À son niveau le bouleversement crée une explosion considérable.

« Boum », c’est une détonation lourde, d’une masse percutant un élément très dense. Aucun ne cède. Aucun ne bouge. La percussion est violente, instantanée. L’énergie est comprimée, maintenue dans l’instant de la collision, laissant juste échapper une résonance sourde.

D'autres raconteraient cette expérience différemment, avec d'autres mots sans doute, mais peut-être pour décrire la même sensation…

dimanche 27 mars 2016

L'importance d'avoir un Maître



Plus j'avance dans ma pratique et plus je comprends l'intérêt d'avoir un Maître.

La subtilité des arts martiaux internes est telle que notre évolution dans ce domaine est inévitablement liée à notre Maître.

Un autodidacte ne pourra que se confronter à lui-même et à sa propre vision. Il pourra réfléchir, mais qu'à partir de ce qu'il connait déjà, alors comment changer ce qui doit être changé sans se dévoyer ? Aucune chance d'y arriver...
De plus, bien que la forme (kata) soit notre guide, elle ne donne pas la vérité de façon claire. Donc répéter inlassablement avec rigueur les katas appris, ne sera pas suffisant pour comprendre "l'essence" de l'art pratiqué.

Mais même si nous avons un Maître, encore faut-il qu'il n'est lui-même pas dévoyé la forme par commodité ou pour satisfaire une sensation ou passer une difficulté. Il faut également qu'il souhaite transmettre son art. Il lui serait tellement facile de ne pas transmettre les clefs essentielles à ses disciples... sans même qu'ils s'en aperçoivent, en mettant leurs échecs sur leur manque de travail ou de rigueur.

Au départ, chacun d'entre nous décide de suivre un Maître, sans vraiment savoir ce qu'il vaut ou ce qu'il sera disposé à nous transmettre. C'est donc une part de chance que de choisir un Maître digne de ce nom, mais c'est de notre responsabilité de le suivre ou non.

Pour ma part, je remercie le hasard (s’il existe) de m'avoir fait rencontrer mon Maître parce que je sais depuis le début, et chaque rencontre avec lui me le confirme, que c'est un guide qui a tout le savoir, le savoir-faire et le savoir-être requis pour faire de moi un pratiquant d'arts martiaux internes. 

C'est donc à moi de faire le nécessaire...