J’ai déjà parlé de géométrie, d’axe ou d’angles, qui sont
les bases des arts martiaux internes. Cette rigueur physique est
indispensable à la réussite et à l’efficacité de nos mouvements. C’est un
travail et une étude de longue haleine auxquels doivent se confronter tous les pratiquants
recherchant la maîtrise de ces arts. Mais bien que cette recherche soit
complexe, longue et minutieuse, elle ne suffit pas à atteindre le niveau que nous
recherchons, à savoir, la capacité de manipuler, dominer l’autre. Ce « seul »
travail technique permettra une certaine efficacité, mais seulement incertaine
et pas absolue…
Pour dépasser ce niveau « physique », il faudra
passer de l’autre côté. Dans l’interne, dans la martialité, la motricité fine…
Il faudra aussi être capable de maîtriser tout cet aspect des arts martiaux pour
passer dans ce qui fait d’eux les arts internes : la sensibilité.
Dans notre École, tous les exercices à 2 posent cet
aspect en toile de fond. Toute approche, tout contact, toute manipulation
dépend de la relation que nous créons et maintenons avec l’autre. Pour cela il
faut avoir une sensibilité accrue afin de ressentir s’il faut mettre plus,
moins, de force, de détente, de lourdeur… s’il faut diriger vers telle ou telle
direction et jusqu’où aller… L’ensemble des enchainements est aussi là pour
développer chez nous cette sensibilité.
Les arts martiaux internes s’opposent en ça avec de nombreuses
pratiques martiales ou sportives : ils développent nos sensations et les
affinent plutôt que de les annihiler en frappant fort, brutalement, pour
« exploser » l’autre.
Notre Maître nous dit souvent qu’il faut choyer l’autre,
le mettre dans un meilleur état qu’il ne l’est au départ pour qu’il se laisse
faire. Nous devons lui proposer des conditions positives pour qu’il accepte
d’être manipulé. Mais pour réussir cet exercice il nous faut d’abord ressentir
tous ces changements, toutes ses réactions. Il faut être capable de les
ressentir, de les lire et les interpréter correctement. Pour que l’autre ne
s’oppose pas à nous il faut lui donner envie de faire ce qu’on attend de lui…
C’est là la plus grande difficulté des arts martiaux internes : Donner
envie à l’autre de faire ce qu’on veut qu’il fasse. C’est une manipulation de
« haut vol » dont la clé est une sensibilité extrême. Ce principe
rejoint les autres principes des arts martiaux internes : finesse, justesse,
ouverture et prise en compte de l’autre.
Donc, en plus de respecter toute la géométrie et les
contraintes physiques, il faudra être capable de développer notre sensibilité.
Mais sans doute que le lien entre les deux n’est pas si éloigné qu’il peut le
paraitre…
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