mardi 30 juin 2015
Comment changer le monde ?
Voici une liste non exhaustive de questions posées par mon Maître :
Qu'est-ce que l'apprentissage en art martial ?
Qu'est-ce que la répétition en art martial ?
Devons-nous chercher à vivre ou à mourir ?
Comment intégrer l'Univers dans nos gestes ?
Comment augmenter l'amplitude de nos mouvements ?
Comment créer la force en art martial interne ?
Qui est notre Maître ?
Qu'est-ce l'envers / l'endroit ?
Qu'est-ce qu'un corps droit ?
Qu'est-ce que l'inverse de la réussite ?
Être immobile ou en arrêt. Est-ce la même chose ?
Comment intégrer le Yin et le Yang ? Que manque-t-il ?
Quelle est la différence entre le Chousi jing et le Chansi jing (canalisation de force) ?
Réfléchir à ces questions nous amène à une dynamique intellectuelle et physique. Il ne s'agit pas de répondre verbalement, au moins dans un premier temps, mais plutôt de montrer avec notre corps.
Pour progresser en art martial, il ne s'agit pas de lire ou de palabrer. Il faut faire !
Par ce travail de recherche, nous cherchons les réponses. Une fois trouvées, si elles sont réellement comprises et intégrées dans notre pratique, elles changent notre façon de voir, de faire et d'être.
Elles changent donc le monde...
Changer ou non ?
Ce n'est que lorsque nous sommes confrontés au risque de perdre ce que nous avons, que "l'objet" augmente sa valeur.
Ne devrions-nous pas vivre chaque jour avec la conscience de ce risque, de cette impermanence permanente, pour estimer au plus près la valeur de ce que nous avons ou recevons ?
Il y a peu, cette perte possible est passée dans le domaine du réel.
Face à ce fait, il y a deux possibilités : laisser faire et voir, ou se retrousser les manches, se battre, changer, pour mettre toutes les chances de son côté pour que cela n'arrive pas.
Mais changer pour ensuite revenir à ce que nous faisions ou étions avant, ne fera que nous renvoyer en face de ce risque réel.
Le changement doit donc être présent à chaque instant, chaque jour.
De ce fait, l'accumulation de ces changements de tous les jours entraine un changement intérieur important, visible de l'extérieur. Une fois ce processus réellement engagé, telle l'addition des particules d'eau se rassemblant pour créer une vague, le mouvement prend de l'ampleur, devient impossible à arrêter.
Il se voit, se fait ressentir et change la relation que nous avons avec les autres.
Je comprends le sens de "change toi toi-même si tu veux changer les autres" ou "nous sommes les acteurs de notre propre changement". Bien que cela puisse être immiscé par quelque chose d'extérieur, le changement véritable ne peut se faire que par soi-même.
Les autres ne peuvent changer que parce que nous changeons nous-mêmes.
Donc, au lieu de se battre contre les autres, c'est contre nous que nous devons nous battre. Le reste n'en sera que la conséquence...
Appliqué au sens martial du terme, c'est en travaillant sur nous et avec l'autre que nous réussirons à le changer vers ce que nous cherchons. Au départ, nous pensons devoir obliger notre adversaire à changer pour faire ce qu'on veut, mais c'est en fait tout le contraire.
Il est temps de changer...
lundi 29 juin 2015
Une soif sans fin...
Après 20 ans de pratique, je ne me
lasse toujours pas de répéter les mouvements appris.
Certes, le chemin est long et
l'apprentissage difficile, voire douloureux. Nous cherchons à repousser nos
limites et cela ne peut pas se faire sans effort, ça va de soi... Mais plus
l'effort est important et plus ce qui est acquis l'est profondément. Plus la
chose est difficile à acquérir et plus elle est précieuse. N’oublions pas que
nous cherchons un véritable trésor !
Il est vrai que cette logique
s’oppose à la rapidité, à la facilité et à l'effervescence du monde actuel,
mais pour moi, c'est de manière posée, réfléchie et petit à petit qu'on
acquière durablement les choses. Construire trop vite est l'assurance d'obtenir
quelque chose de fragile avec de nombreuses malfaçons. Donc, selon moi, le
temps d'apprentissage des arts que nous pratiquons est cohérent avec la
richesse, la durabilité, la profondeur et l'efficacité que nous recherchons
dans notre pratique.
Notre travail est de répéter
inlassablement les gestes appris, mais répéter pour répéter n'a pas de sens. Il
nous faut justement répéter pour créer du sens et donc changer, sinon les
mouvements, leur nature.
En tant qu’élève, nous devons
intégrer la théorie que le maître nous transmet dans notre pratique.
Si nous faisons cela, notre
pratique questionnera la théorie reçue, nous confrontera à des problématiques.
En essayant de les résoudre, nous questionnerons le maître, ce qui affinera
notre savoir, que nous pourrons ensuite réinjecter dans notre pratique, ce qui
posera de nouvelles problématiques... C'est un cercle sans fin de réflexion et
de mise en application. La répétition du même mouvement n'est en fait qu’apparente,
le changement se trouvant dans chacun de nos gestes. Donc d'un certain point de
vue, le mouvement est toujours le même, mais il ne l'est jamais... C'est en
cela que cette inlassable répétition n'est jamais lassante, puisque chaque
mouvement s’enrichit du précédent et des savoirs qui nous sont transmis.
C’est
cette évolution de savoirs et de savoir-faire qui va façonner notre
savoir-être, c'est-à-dire notre Moi.
Pour ma part, je garde à l’esprit
une phrase de mon maître : c’est par l’échec qu’on obtient la réussite. En
cas d’échec, je me dis qu’il suffit de changer quelque chose, peut-être juste
un tout petit rien, pour que je réussisse. Alors, je sais que je n’ai qu’une
chose à faire : changer quelque chose et recommencer !
Il ne faut pas se voiler la face,
notre motivation est parfois ébranlée, mais après 20 ans de pratique, je peux
vous assurer que chaque rencontre avec mon maître, chaque entrainement et
chaque exercice n’est rien d’autre que du bonheur !
Les arts martiaux internes ont fait de moi...
Les arts martiaux internes ont
fait l'homme que je suis devenu et feront l'homme que je serai demain.
Si je ne devais dire qu'une
phrase pour expliquer ce que les arts martiaux internes représentent pour moi,
ce serait celle-ci.
Au-delà d'un maître et d'un art
exceptionnels, c'est un véritable sens à ma vie que m’a donné ma rencontre avec
maître Sochokun. Nous avons tous une vie unique et déjà bien remplie, mais les
arts pratiqués dans notre école apportent à chacun de nous quelque chose en
plus, un sens supplémentaire, qui la rendra plus riche et plus particulière, je
puis vous l’assurer !
Le Hsing-I-Chuan, art dans lequel
je me suis davantage investi, est un puits de science sans fond. C'est un apprentissage
qui nous apprend un équilibre subtil entre le corps et l'esprit, alliant
finesse et puissance, travail physique et mental.
Pour moi, ce style de boxe
chinoise est un trésor.
Le travail physique découlant de sa pratique nous
maintient en bonne condition et les réflexions auxquelles nous sommes
confrontées stimulent notre cerveau. Je suis certain que c'est le secret de la bonne
santé et de la longévité !
A travers notre apprentissage,
nous augmentons notre savoir et nous performons notre savoir-faire, ce qui modifie
notre savoir-être, c'est-à-dire ce que nous sommes. Il nous aide à changer, à
évoluer.
Cette évolution nous évite la
stagnation. Tout étant en perpétuel mouvement, stagner signifie, selon moi,
mourir. C'est donc un vrai chemin de vie. Concernant la notion de mouvement
permanent, prenons un exemple concret : dans toutes les disciplines que
nous pratiquons, nous ne devons jamais être en arrêt. Dans ces conditions,
comment pouvons-nous être en mouvement lorsque nous sommes immobiles ?
Répondre à cet apparent paradoxe est une des nombreuses énigmes que nous
devrons résoudre. Être capable de comprendre la réponse aussi bien avec notre
esprit qu’avec notre corps, fait de nous quelqu’un qui fait les choses de
façons différentes de tout un chacun.
Notre école est un lieu
particulier dans la ville. Les différents protocoles, pour les saluts, lorsque
nous recevons des enseignements ou lors des passages de grade, nous permettent
de rentrer dans un autre monde que celui de l'extérieur. Cela peut paraitre
contraignant au début, mais si nous donnons du sens au moindre de nos gestes,
nous transformons des gestes anodins en gestes effectués en pleine conscience,
ce qui modifie leur nature.
Mais loin de nous couper du
monde, nous essayons de nous y intégrer de façon plus harmonieuse. Par des
gestes codifiés, transmis de génération en génération, nous avons l’accès à la compréhension
des principes élémentaires pour nous mouvoir en nous unifiant avec ce qui nous
entoure.
En changeant notre façon de
faire, nous changeons notre façon de voir. Et inversement. Cette dynamique crée
chez moi une effervescence intérieure qui maintient ma motivation intacte
depuis 20 ans.
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