Certains pratiquants d’arts martiaux ont comme
motivations la recherche du bien-être, pratiquer une activité physique,
rechercher un certain équilibre, etc…
Pour ma part, ce sont des conséquences
positives, mais secondaires. Depuis ma jeunesse je pratique les arts martiaux
avec comme motivation principale l’efficacité. Être capable de défendre ma vie
et celle de ma famille dans une situation de danger de mort.
Je pense que la véritable maitrise n’est pas forcément
d’exploser, de pulvériser mon adversaire, mais d’être capable de le
neutraliser.
Quelle différence me direz-vous ?
On peut penser qu’être fort permet de vaincre un
adversaire avec un instinct sauvage, primaire, mais qui permet de terrasser
l’autre. C’est vrai.
Mais pour moi, être vraiment fort c’est être capable de
neutraliser un adversaire en douceur. Avec la capacité de le détruire à n’importe
quel moment. C’est rester serein devant cette menace de mort, sans peur, sans
perte de nos capacités, sans avoir le cœur qui s’emballe, le souffle court et
les jambes coupées.
Or après 20 ans de travail martial, je crains d’être
paralysé devant une telle menace. Quelle perte de temps, d’efforts et d’énergie,
si je me faisais balayer comme un moins que rien, après tant d’années de
pratique…
Acquérir les techniques, les appliquer et être efficace
avec nos partenaires d’entrainement n’est pas un gage de victoire dans une
situation réelle de danger. Tant de paramètres sont différents, entre réaliser
un exercice entre nous dans notre école et dans la « vraie vie », que
je me pose la question : serai-je efficace au moment où je
devrai l’être ?
Il s’agit davantage de réussir à Être plutôt qu’à Faire
(bien que ces deux aspects se nourrissent l’un l’autre…). Mais il est certain
que la technique réalisée avec la peur au ventre ne sera pas aussi efficace que
celle effectuée dans notre cadre « scolaire », avec sérénité, détente
et sous les conseils précieux de notre Guide...
Comment rester aussi efficace
que dans ces moments ?
Il s’agit bien d’un problème de savoir comment être au
moment de mettre en place notre savoir-faire. C’est ce savoir être qui
déterminera l’efficacité de notre savoir-faire, lorsque nous aurons à le mettre
en pratique…
J’ai donc posé ces doutes à mon Maitre.
Et mon Maître m’a dit : « Lorsqu’une situation
de combat se dessine, tu dois penser à mettre tellement de choses en place, que
tu ne peux pas penser que l’autre parait plus grand, plus fort, plus méchant
que toi ».
Et c’est vrai que si nous prenons l’exemple de la
conduite, imaginez-vous prêt à prendre un virage serré à vive allure. Nous nous
mettons sur le rapport de vitesse qui nous parait approprié, nous adaptons
l’allure, pour être en pleine vitesse au point de corde, nous calculons les
angles d’arrivée de notre trajectoire et de sortie du virage en tenant compte
de la forme de la courbe. Pendant plusieurs secondes, nous vivons une
succession d’instants présents qui ne sont que calculs, évaluations des
paramètres, adaptations « millimétrées » à la situation, etc… Après
coup, nous réalisons ce que nous avons fait, les risques pris etc… Mais sur le
moment, nous n’avons pas eu le temps de penser au danger, nous avions tellement
d’autres choses à faire…
Dans la pratique des arts martiaux internes, nous devons
entrer dans ce même phénomène. Et ce ne sera qu’après que nous aurons le temps
de réaliser le véritable danger auquel nous nous sommes confrontés…
Une phrase mainte fois entendue me vient à
l’esprit : « Tu dois te recentrer et faire ce que tu as à
faire ».